À situation exceptionnelle, méthodes exceptionnelles...
Trouver les bons arguments pour vendre les idées innovantes nécessite de confronter intuition et terrain : le marketing traditionnel laisse place au marketing de l’innovation !
“L’innovation n’a qu’une seule visée : permettre à l’entreprise de créer son propre marché et donc de ne pas tomber dans la guerre des prix.
Voilà pourquoi, en création d’entreprise innovante, le marketing traditionnel, reposant sur un cycle de vie du produit et du prix de vente, ne s’applique absolument pas !”, explique Denis Feuillant, conseiller Novacité.
Dans son ouvrage L’antibible du marketing et du management paru en mars 2007, Paul Millier, professeur à EM Lyon, pointe précisément l’inadéquation des grands principes du marketing appliqués à l’innovation. “Lorsque l’on se trouve dans le domaine de l’exploration, il faut pratiquer un marketing expérimental, consistant à fabriquer avec l’aide du consommateur une information que l’on n’aurait pas pu collecter par simple observation. Soit et autrement dit, à secouer le cocotier”, image l’auteur. Dans cette posture, l’innovateur cherchant à faire émerger une idée radicalement nouvelle procède par collecte de petits morceaux d’information éparpillés. Plus que d’une méthode, il s’agit d’une “déprogrammation” des habitudes induites par une observation simple : on ne peut pas demander à la clientèle-cible de s’exprimer sur des besoins qu’elle n’imagine pas encore. Il faut donc aller sur le terrain, s’imprégner de la culture, voir comment les clients vivent, évoluent et s’adaptent aux contraintes de l’offre existante, pour pouvoir imaginer les contours de l’offre innovante…
Une méthode qui s’applique particulièrement bien aux start-ups, entièrement orientées autour de l’idée d’innovation. Mais aussi aux services marketing des entreprises qui cherchent comment vendre les innovations mises au point par leurs centres de recherche : dans l’état transitoire qui sépare le développement de l’idée de sa mise en marché, on pratique un “marketing expéditionnaire” : des sorties rapides et répétées pour permettre aux clients potentiels de toucher, jauger et critiquer le produit, puis de le faire évoluer en fonction de leurs observations. Un processus de co-développement dont on voit bien les bénéfices - sortir une offre en parfaite adéquation avec les attentes tout en “préparant le marché” - mais qui nécessite du temps et s’engage bien en amont.
“Cependant, lorsque l’on est pressé et l’offre déjà développée, rien n’empêche d’adapter cette méthode pour inciter le créateur à cerner et scinder son marché, en déterminant les segments susceptibles de vouloir acheter cette innovation”, avance Denis Feuillant. Le marketing de l’innovation convoque alors l’intuition pour tenter de répondre à deux questions : quel problème l’offre résout-elle et quels éléments décisifs vont entraîner l’acte d’achat ? Sous-entendu : qui dois-je cibler en priorité ? Au cœur de cette méthode d’analyse des marchés qui n’existent pas encore : ce que Paul Millier nomme la “segmentuition” - un nom déposé à l’INPI -, où la vision de l’innovateur se voit progressivement affinée par une batterie de tests logiques et d’allers et retours. Car, là encore, le secret réside dans l’articulation entre stratégie et terrain : “L’info que l’on a intuitivement ne vaut que si elle est validée par le terrain. C’est pourquoi, à Novacité, nous revenons aux cours de technique de vente et de gestion du face à face avec le client ; là où, souvent, émerge la problématique du client : une matière première essentielle pour alimenter la réflexion marketing”, confirme Denis Feuillant.
Valérie Terrier
Contact :
Denis Feuillant 04 72 40 82 49
Question à
Emmanuel Gonon, directeur général-fondateur d’Oslo Software.
Comment avez-vous mis en œuvre un marketing de l’innovation lors de la création de votre entreprise ?
“Oslo, éditeur de logiciels pour le management dynamique de ressources pour les industries, a été créé avec une technologie issue du CNRS. Dès le départ, s’est donc posée la difficulté de savoir comment appliquer, dans un autre contexte, une technologie conçue pour automatiser une navette spatiale. En clair, il nous fallait définir les marchés sur lesquels cette technologie est susceptible d’apporter de la valeur et de trouver des acheteurs. Et dégager progressivement les utilisations les plus pertinentes. Nous sommes donc partis à tâtons, en formulant des hypothèses, en rencontrant des gens qui les détruisaient immanquablement, en prenant des claques et en recommençant…
Je me suis également trouvé confronté à la difficulté de faire adhérer les équipes en interne. Mener de front le marketing et les ventes exige une démarche commerciale très créative, s’élaborant chemin faisant. En fait, la grande caractéristique du marketing de l’innovation, c’est que le marché n’existe pas au départ : on n’a pas de produit défini, pas d’argumentaire et pas de cible. Il faut faire preuve de beaucoup d’intuition et rationaliser progressivement. Au final, l’approche “marketing de l’innovation” nous a permis d’établir une cartographie précise de notre marché. Un outil précieux pour vendre, dont on peut également tirer une lecture technique : comment faire évoluer le produit en fonction des marchés définis ? Nous sommes ainsi passés du stade d’une société poussée par sa technologie à celui d’une société tirée par son marketing”.
I-Nova…tion gagnante !
L’éditeur de logiciels pour le management de l’innovation I-Nova, labellisé Novacité en 2002, a reçu le trophée Bref Rhône-Alpes de l’innovation service.
Destination création
Un brin d’exotisme… à point nommé si vous rêvez de vacances : adoptez la nouvelle édition du Guide du Routard consacrée à la création d’entreprise. Région par région, il présente 2 000 bonnes adresses agrémentées de contacts, sites web, concours et bons plans. à découvrir aussi, sur le Salon des entrepreneurs de Lyon, les 18 et 19 juin.
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AgendA
Séminaire Dirigeant
CCInnovation lance, le 7 avril, une nouvelle session de son séminaire Dirigeant. Il associe cinq jours d’action collective à trois demi-journées de suivi individuel. Objectif : donner aux dirigeants de petites entreprises une méthodologie et des outils pour formaliser leur stratégie et leur projet de développement ou d’innovation.
Contact : Anne-Marie Paquelet 04 72 40 57 05
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